25 janvier, 2007

A propos des résistances à l'informatique

Editorial :

"Le Chili avait besoin de se repositionner dans une économie globale qui exigeait de nouvelles connaissances et compétences chez ses travailleurs. Il devait aussi jouer un rôle nouveau dans la communauté internationale, celui d 'un pays démocratique construisant une citoyenneté renforcée… C'est dans ces conditions que les ordinateurs sont devenus un élément désiré du système éducatif chilien. On espérait que les ordinateurs feraient changer l'école,on les voyait pas seulement comme un outil d'efficacité mais aussi de transformation"

Dans un article de la revue Interactive Educational Multimedia (n°13 d'octobre 2006), Monica Kaechele étudie l'introduction des TIC dans le Chili post-Pinochet.

Peu de pays ont eu autant d'attentes envers les TIC. Le Chili espérait que les TIC donnent accès à la connaissance à tous les jeunes Chiliens et amène ainsi plus de justice sociale. Sa modernité devait même développer un sentiment de promotion sociale chez ces jeunes.

Et bien, pour M. Kaechele, la force de ces espoirs n'a pas été suffisante et le Chili constate lui aussi l'échec de l'intégration des TIC dans son système éducatif.

L'auteur se demande donc pourquoi. Suffit-il de parler de "résistance" des enseignants devant un risque de"perte de contrôle" de la classe et des élèves ? M. Kaechele aborde la question sous l'angle de l'habitus cher à Bourdieu.

Pour elle l'outil informatique lui-même en tant qu'outil pour manipuler du savoir et organiser le travail scolaire entre en contradiction avec un système scolaire centré sur la mémorisation de l'information et sa manipulation en éléments fermés qui doivent être appris individuellement. L'utiliser c'est entrer en conflit avec les règles qui organisent les relations entre les enseignants et les élèves, la discipline, la gestion du temps. Ils imposent par eux-mêmes de réfléchir à l'organisation des cours.

Les outils traditionnels sont forcément mieux adaptés à la mémorisation particulièrement quand il y a peu de machines par rapport au nombre des étudiants. A moins qu'on utilise l'ordinateur d'une façon telle qu'il devienne un outil d'enseignement traditionnel et qu'on coupe court aux possibilités de mutualisation et d'autonomie qu'il véhicule.

Dans l'importante littérature qui analyse l'échec de l'intégration des TIC dans de nombreux pays (mais pas partout), le travail de M. Kaechele a l'intérêt de montrer que c'est la recherche de l'efficacité scolaire qui peut l'expliquer et de mettre en évidence la puissance des représentations. Des éléments à débattre.
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